Si la nuit a été moins froide que les précédentes, les premières minutes de notre randonnée du jour nous montrent des mares gelées. L'avantage de ce trek organisé par l'agence Tirawa est que l'on passe plus de temps dans la cordillère Huayhuash. Ainsi, aujourd'hui
avons-nous une "simple" randonnée à la journée nous permettant d'explorer les alentours et en particulier d'aller voir la cordillère Raura voisine. Depuis notre campement, nous commençons à monter progressivement vers le sud.
Le paysage se fait différent ici. De nombreux petits lacs constellent les plateaux couverts de touffes d'herbe blond-vert ondulant sous les fortes rafales de vent froid. Les montagnes évoquent celles du Haut-Atlas marocain avec des faces verticales et des sommets érodés
de pierre noire et rouge.
Vers le col de Portachuelo
Peu avant l'arrivée au col Portachuelo, qui signifie "La porte du ciel" et qu'il ne faut pas confondre avec le col de Portachuelo de Huayhuash gravi hier, le sentier se fait plus raide, passant au pied de hautes falaises.
Depuis le col à 4850 mètres d'altitude, nous avons une belle vue panoramique sur les sommets débonnaires et enneigés de la cordillère Raura. La physionomie de celle-ci est étonnament différente de celle de la cordillère Huayhuash. Ses sommets ronds
n'ont rien à voir avec les pics acérés et les faces très abruptes de Huayhuash.
Nous descendons par le même chemin qu'à l'aller, prenant tout notre temps en cette belle journée. De retour au camp, nous nous baignons une nouvelle fois dans les sources d'eau chaude (à 40°C pour le plus chaud des bassins, tout de même) avant
de prendre le repas sous la tente mess.
L'après-midi est libre et je pars me balader aux alentours, du côté d'une cascade que j'avais repérée hier. Plus haut, le barrage a dû être ouvert pour relâcher de l'eau car la cascade en question charrie beaucoup plus d'eau que la veille.
Nous levons le camp à 7h40 pour remonter la rivière issue de la laguna Viconga, passant à nouveau à proximité de la cascade. Peu après, nous obliquons sur la gauche, en direction du nord. Le sentier s'élève
graduellement, nous nous concentrons sur nos pas et notre souffle.
Le Puscanturpa élève ses sommets couronnés de glaciers sur notre gauche. Il fait toujours aussi beau et la température est relativement agréable pour ces altitudes. Il doit faire dans les 15°C.
Plus loin, nous apercevons un cairn, est-ce le col ? Eh bien non, c'est un faux espoir, l'un de ceux qui ont la faculté de vous casser les pattes... Il nous faut encore marcher trois cents mètres avant d'atteindre le col Cuyoc
(4950 m) d'où nous avons une magnifique vue sur le Puscanturpa, le Cuyoc et la cordillère Raura, dans notre dos. Le Puscanturpa est une montagne basaltique dont les orgues forment d'impressionnantes faces quasiment verticales de plusieurs
centaines de mètres de haut. Une sorte de doigt rocheux, en contrebas du col, semble nous indiquer la direction de notre camp.
Col Cuyoc
Au loin, les sommets acérés du coeur de la cordillère Huayhuash donnent l'impression de nous attendre pour la suite des aventures. Nous entamons la descente avec précaution tant elle est glissante. Les nombreux petits cailloux ronds roulent sous les semelles de nos
grosses chaussures de randonnées et nos bâtons de marche nous apportent un soutien bienvenu. Rapidement, nous atteignons un petit plateau couvert de cactus de petite taille aux aiguilles blanches formant comme des coussins à l'allure bien trompeuse.
Puscanturpa, cactus et fleurs
Plus bas, le camp Elephant (4500 m), où sont déjà montées nos tentes, est en vue. Il tire son nom d'une grosse masse rocheuse dont l'aspect évoque de loin un pachyderme couché dans l'herbe.
La cordillère Huayhuash est située dans un parc naturel où le bivouac sauvage est interdit. Il est donc obligatoire de planter la tente dans l'un des campements officiels gérés par les communautés locales.
Bien sûr, l'emplacement est payant, avec un tarif variant selon le camp, tout comme il faut s'acquitter régulièrement d'un droit de passage. Les paysages sont ainsi moins dégradés et des toilettes "en dur" (souvent une cabane assez sommaire aux murs en parpaings avec une cuvette) sont disponibles.
Les membres des communautés locales se chargent en contrepartie d'assurer l'entretien des lieux, dans l'ensemble parfaitement propres.
Après le repas pris dans la tente mess, nous repartons pour une petite promenade en direction du col Trapecio. Notre objectif est plus modeste : les deux lacs intermédiaires d'où nous avons
une belle vue sur les orgues basaltiques du Puscanturpa.
Lac devant le Puscanturpa
Depuis le second lac, la face sud du Trapecio est impressionnante. Avec cette masse rocheuse, verticale, à la forme caractéristique lui ayant donné son nom et ses glaciers suspendus, je comprends pourquoi il est
considéré comme étant l'un des sommets les plus difficiles de la cordillère Huayhuash.
Le retour au camp s'effectue par le même sentier. Je retrouve Nathalie dans la tente. Elle avait fait demi-tour avant le premier des deux lacs, éprouvant des difficultés à respirer. Cela fait plusieurs jours que nous ne sommes
pas descendus sous les 4000 mètres et la journée de demain s'annonce assez difficile avec le passage au point culminant du trek.
Coucher de soleil et pleine lune sur le Puscanturpa
La fin d'après-midi nous gratifie d'un magnifique spectacle avec le coucher de soleil qui teinte d'orange la face verticale du Puscanturpa tandis que la pleine lune émerge lentement derrière son sommet. Magique, tout simplement...