Jordanie
De Dana à Pétra
Lundi 22 avril 2019
Premier jour d'un trek qui nous mènera de Dana aux ruines de la cité nabatéenne de Pétra. En fait, nous suivrons une partie du Jordan Trail qui traverse le pays du Nord au Sud avec un balisage... qui brille par son absence.
Tracé de notre premier jour de randonnée
La météo n'est pas fameuse. Nous quittons Dana sous les nuages, direction plein sud par le Wadi Dana. Nous cheminons sur une piste sommaire qui descend rapidement. Face à nous, les parois érodées de grès rose contrastent avec le blanc ocre du calcaire que l'on trouve plus haut. Nous perdons rapidement de l'altitude.
Arbre mort dans le Wadi Dana
La météo s'améliore peu à peu. Le ciel se dégage, offrant quelques jolies lumières. La végétation occupe le lit du cours d'eau asséché qui a creusé ces gorges. Des roseaux cohabitent avec des lauriers roses en fleurs en cette fin avril. Par endroits, des genévriers et des acacias poussent au milieu de la rocaille.
Sous une lumière changeante, les lieux sont de toute beauté, les nombreuses couleurs de la roche se révélant sous les rayons d'un soleil joueur.
Nous faisons un petit détour par d'anciennes mines de cuivre. Des tunnels étroits et assez bas de plafond s'enfoncent dans la montagne sur quelques dizaines de mètres. Par curiosité, nous nous y faufilons, éclairant le boyau avec nos lampes frontales.
Après le repas pris à l'ombre d'un figuier, nous parvenons au bout du wadi. Des tentes de bergers bédouins, des troupeaux de chèvres aux longues oreilles... Nous retrouvons des bribes de civilisation.
Ruines dans le Wadi Dana
Nous parcourons encore quelques kilomètres le long de la piste poussiéreuse, dans un paysage de moins en moins escarpé, et deux pick-ups viennent nous chercher. Fin de randonnée, nous venons de parcourir dix-huit kilomètres.
Coucher de soleil sur les montagnes depuis le campement
Après une heure de véhicule, nous atteignons notre campement en pleine nature face aux montagnes. Première nuit de bivouac en Jordanie !
Mardi 23 avril 2019
De bon matin, nous partons en direction de l'est vers la muraille de montagnes qui faisait face au camp. Malgré le ciel voilé, il fait bon, rapidement chaud même. Un temps que je trouve idéal pour randonner.
Tracé de notre deuxième jour de randonnée
Toujours hors sentier dans un véritable champ de pierres, nous obliquons alors vers le sud jusqu'à atteindre une faille dans la muraille, formant une sorte de gorge, le Wadi Al-Feid, dont le nom signifie "difficile".
Le sentier muletier que nous empruntons en rive gauche s'élève rapidement, prenant de la hauteur à la faveur de lacets serrés. C'est l'occasion de mettre les mollets à l'épreuve sur quelques centaines de mètres.
Depuis le col du Ras Al-Feid
Peu à peu, le temps se dégage, le bleu du ciel finissant par l'emporter. Nous nous élevons au creux du canyon où pousse une végétation assez abondante bien que le cours d'eau soit à sec.
Du col, atteint après quelques efforts supplémentaires, nous avons une magnifique vue sur un vaste dépression, une sorte de grand canyon jordanien. Je ne m'attendais pas à cela et j'avoue être sous le charme des lieux. Face à nous, des parois de grès rose sculptées par le vent côtoient des roches volcaniques noires formant des orgues. Tout au fond, on devine un cours d'eau rachitique serpentant tant bien que mal dans la rocaille.
La descente se fait rapidement sur un sentier plus ou moins marqué. Un surplomb sur une gorge de roche noire nous permet de découvrir une cascade aux eaux d'un vert étonnant.
Cascade dans le Wadi Feid
Le pique-nique pris à l'ombre des roseaux, nous repartons en cheminant dans le cours d'eau asséché, passant par des canyons aux couleurs étonnantes. Au blanc ocre succède le rose ou le noir. En contemplant ces motifs évocateurs,
je pense à ces enfants qui jouent à voir des formes dans les nuages : c'est la même chose ici, avec cette roche. Je m'étonne de voir dans ces arabesques le profil d'un oiseau ou des silhouettes humanoïdes.
Les étonnantes arabesques dans le grès du Wadi Feid
Une dernière montée par une piste et nous atteignons notre campement situé sur un replat. Aujourd'hui, nous avons parcouru douze kilomètres.
Mercredi 24 avril 2019
Le fort vent froid qui s'est levé au milieu de la nuit, secouant la tente dans tous les sens, nous accompagne partie de la matinée. Le sentier en balcon offre de belles vues sur des montagnes de grès rose ou beige.
Tracé de notre troisième jour de randonnée
Au-delà, devant nous, la vaste plaine du Rift noyée dans la brume. Nous cheminons sur la bordure d'un plateau calcaire bordé de genévriers morts, le Jabal Safaha, sur un sentier plutôt bien marqué.
Depuis la crête du Jabal Safaha
Les formations rocheuses sont intéressantes surtout lorsque nous basculons sur un escarpement de grès. Les couleurs se mêlent magnifiquement, mariant rose, ocre et blanc.
Sur notre droite, il y a toujours ce vide ponctué de formations rocheuses torturées, sculptées par l'érosion du vent. Par endroit, cela forme des dentelles, des arches et piliers. Un spectacle étonnant, de toute beauté.
La roche forme des dentelles
Notre camp est situé au creux d'une vaste formation rocheuse à quelques centaines de mètres d'un campement bédouin. Les treize kilomètres parcourus dans la journée se font à peine sentir dans les mollets.
Jeudi 25 avril 2019
La matinée offre un intérêt tout relatif côté randonnée. Nous reprenons la descente de la vallée en empruntant la piste qui passe au milieu des champs d'orge rachitique et de quelques campements de bédouins.
Tracé de notre quatrième jour de randonnée
Peu avant d'atteindre la route, nous explorons une gorge étroite au sol couvert de gravier blanc. Les parois étroites du siq, comme on appelle ici ce type de formation, laissent passer des rayons de soleil qui mettent en valeur la roche rose et les motifs qui s'y dessinent.
Les motifs sur la roche évoquent des silhouettes encapuchonnées
Quelques gros iules noirs courent sur les murs. Il faut faire attention où nous mettons les mains, ces bestioles ayant la fâcheuse tendance à mordre, une morsure relativement douloureuse, paraît-il. Je n'ai pas trop envie d'essayer pour me faire ma propre opinion !
L'un des nombreux iules peuplant la gorge
Après le repas, nous entamons la descente d'un très joli canyon aux couleurs mêlant le blanc et l'ocre, décidément la palette de ce coin de Jordanie.
Nous débouchons en arrière de Siq Al Bared, alias
Little Petra. À l'époque nabatéenne, environ deux cents ans avant Jésus-Christ, il s'agissait d'un caravansérail, une halte pour les caravanes de dromadaires avec des chambres pour se reposer. Les ancêtres des motels, en quelque sorte.
Little Petra
Je pressens que l'architecture de ces bâtiments aux façades creusées dans les falaises n'est qu'un avant-goût de ce qui nous attend à Pétra.
Un peu plus loin, nous visitons les vestiges du site néolithique de Baria, occupé de -8500 à 5500 avant Jésus-Christ. Il n'en reste pas grand-chose, principalement les fondations et quelques murets d'anciennes habitations.
L'agriculture est née dans cette région, le croissant fertile, de l'Iran à la Turquie, il y a 12000 ans.
Notre campement se situe un peu plus loin à quelques kilomètres du site de Pétra que nous visiterons demain.